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Quand la revue « Esprit » se préoccupe d’IA
Quand la revue « Esprit » se préoccupe d’IA Dans son numéro d’avril, la publication analyse les conséquences de l’intelligence artificielle contre ce qui fait notre humanité, à savoir l’esprit. Article réservé aux abonnés La revue des revues. C’est à une révolution technologique en cours, celle de l’intelligence artificielle (IA), qu’est consacré le numéro d’avril de la revue Esprit. Comme d’autres ruptures technologiques avant elle, elle nous somme « de réinterroger notre devenir à l’aune des possibles qu’elle ouvre, autant que notre présent, qu’elle transforme déjà », écrivent, dans leur introduction, le professeur de lettres et de philosophie Nicolas Léger et le doctorant en philosophie Adrien Tallent. Pour ces deux chercheurs se joue, avec l’IA, « une mise en concurrence de la technologie avec ce que nous avions jusqu’ici coutume de définir comme propre à l’humain : son esprit ». Cette mise en concurrence prend les traits d’une véritable guerre tant les fronts sont nombreux : ces machines intelligentes se sont invitées dans toutes les dimensions de la vie humaine : sociale, économique, politique, technique. La rupture anthropologique est profonde. Pour le philosophe suisse Mark Hunyadi, les « tech titans » (géants de la tech) transforment progressivement notre rapport au monde. En empêchant les hommes de penser et de juger, l’IA érode les facultés humaines jusqu’à faire de notre esprit un « organe atrophié ». L’individu est poussé à se conformer en permanence à l’ordre établi : « la part restante de la raison, sa part non alignée, se réduit comme peau de chagrin ». « Le “techno-cocon” se referme » L’IA risque de changer notre rapport aux autres, ajoute l’écrivain Alain Damasio dans un entretien publié dans la revue. Il assure que les intelligences artificielles personnalisées – qu’il nomme « MyIA » – vont bientôt envahir nos vies : elles épouseront nos goûts et feront tout pour nous plaire en puisant dans nos données pour s’adapter à nous. « Le “techno-cocon” se referme. Il me paraît évident que si notre rapport à l’altérité a déjà été affaibli par les réseaux, il le sera encore plus par MyIA », regrette-t-il. Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Doter l’IA d’une personnalité n’est pas sans risque La revue Esprit ne se contente pas d’alerter sur les risques que fait peser l’IA : elle invite aussi les humains à lui résister et à lui opposer des représentations du monde alternatives. En la matière, l’art et la fiction sont une ressource essentielle, estime le critique littéraire Alexandre Gefen. « Pour un artiste, utiliser une IA, c’est souvent la “hacker”, l’emmener dans des chemins de traverse, la forcer à une créativité moins normée. » « Les artistes utilisant l’IA, ajoute-t-il, sont particulièrement bien placés pour penser l’IA, en analyser les biais, en remettre en question l’éthique : la réflexivité de l’art s’exerce à plein. » Il vous reste 17.36% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.
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